14 Ekim 2012 Pazar

TRADUCTION TECHNIQUE ET NOUVELLES TECHNOLOGIES :
MÉTAMORPHOSES DU CADRE DIDACTIQUE


Nathalie Gormezano
Institut Supérieur d’Interprétation et de Traduction (Paris)

La traduction technique aujourd’hui évolue rapidement grâce à l’énorme apport des
nouvelles technologies dans ce secteur, à savoir les moteurs de recherche sur internet,
les sites web spécialisés, les bases de données en ligne, les lexiques et dictionnaires
électroniques, les logiciels de Traduction Assistée par Ordinateur, la Production
Assistée par Ordinateur, tous les logiciels multilingues de spécialités, les logiciels
professionnels dans différents domaines techniques, les messageries électroniques, etc.
Les transformations qui touchent le travail même du traducteur, c’est-à-dire non pas
son savoir faire mais sa façon de faire, sont liées à ce nouvel outil qu’il utilise non
seulement comme un outil supplémentaire à sa disposition (au même titre que peuvent
l’être les dictionnaires, les livres spécialisés sur les domaines à traduire, etc.) mais de
plus en plus comme l’outil de la traduction.
Si de toute évidence les outils du traducteur technique ont changé, il est clair que
l’enseignement de la traduction technique connaît de fait des transformations. Trois
aspects nous semblent spécifiques de cette évolution : tout d’abord le travail de
formation sur les modes de recherche, puis l’analyse des contraintes liées aux
nouveaux outils, et enfin une nouvelle approche méthodologique du contrôle qualitatif.
 
MODES DE RECHERCHE ET CONSEIL TECHNIQUE
 
Le rôle du formateur en traduction technique a toujours été d’enseigner non pas un
savoir-faire mais un ‘comment’ faire (le savoir-faire pour sa part s’acquérant à force
de faire). Or, dès l’apparition des nouvelles sources d’information, le formateur a dû
reconsidérer les modes de recherche et les techniques mêmes liées à la recherche
documentaire préalable à toute traduction technique, pour y intégrer les nouvelles
sources en question.
Une fois le document à la portée des étudiants, il est nécessaire aujourd’hui
d’élaborer une stratégie didactique d’approche des nouvelles technologies. Le
professeur doit guider les étudiants dans la maîtrise des outils qui sont à leur portée et
les orienter dans les voies de recherche les plus congruentes. Il est alors conseiller
technique. Ce rôle peut parfois dérouter certains étudiants qui ont l’assurance de
dominer parfaitement ces outils (peu nouveaux pour la plupart d’entre eux). Or,
concrètement, il s’avère que lorsqu’ils sont réellement confrontés à la recherche, ils
ont besoin de quelques conseils. Il est donc intéressant de leur proposer des phases de
travail afin de leur permettre de manier ces outils plus efficacement.
La phase d’étude permet d’utiliser les nouveaux outils et de réunir une grande
quantité de documents référents, ce qui permet une approche comparative riche, regard
quantitatif sur le document.
La phase de repérage est une approche plus qualitative. Les sites référents et les
documents sur sites permettent d’avoir une vision globale du secteur abordé. Il est
important de référencer les sites qui pourront être utilisés par la suite. Dans un premier
temps il s’agit de repérer les descriptifs des différents éléments dans les deux langues
de travail concernées. Pour allier efficacité et rapidité, l’étudiant doit apprendre à lire
avec l’oeil à l’affût des éléments propres au document source. Pour ce faire, il est
nécessaire de s’imprégner du document source avant de le traduire.
La phase d’approche contextuelle permet, une fois les éléments repérés, identifiés
et définis grâce aux sites référents, une seconde phase de recherche : la recherche
lexicographique dans les lexiques et dictionnaires électroniques multilingues et toutes
les bases de données multilingues en ligne ou personnelles. Les termes techniques
apparaissent souvent multiples selon les documents référents et selon les usages
(terminologie technique de publication ou terminologie technique d’usage). Le
formateur doit alors orienter le choix de l’étudiant. S’agit-il d’un document technique
de publication ou technique d’usage, ou les deux. Parfois les deux terminologies se
rejoignent, parfois elles diffèrent. Ces réflexions doivent être menées en contexte à
l’aide des éléments issus des bases de données et dans une optique analytique. Cette
approche peut bien entendu permettre aux étudiants d’élaborer leurs propres bases de
données multilingues complètes (lexique, glossaire, analyse comparative des termes,
etc.).
La phase de visualisation est indissociable de la phase précédente. Il s’agit
d’apprendre à lire des schémas et à retrouver des images ou des plans permettant de
repérer les éléments qui ne sont pas trouvés dès les premières recherches ou qui ne
sont pas clairement distingués : pourquoi un seul terme dans la langue source pour
trois dans la langue cible, ou l’inverse par exemple. Chercher à voir les éléments,
schémas ou photos fait partie de la mise en place des bases de données contextuelles
nécessaires à la traduction. Pour cela, il suffit de repérer des sites ou de trouver des
logiciels au service de la visualisation. La grande richesse de documentation actuelle
rend possible une vision détaillée des éléments sous différentes formes et en un temps
record.
Cette notion de temps fait partie des métamorphoses didactique et professionnelle :
ce qui se faisait en trois jours se fait en une heure. Résultat : produire plus en moins de
temps. Il s’agit de chercher vite et de se déplacer habilement. Pour l’entraînement à la
rapidité, il est possible de donner des temps limites de recherche en fonction de la
taille des documents et de la phase d’approche. L’étudiant doit pouvoir résumer le
procédé de sa recherche pour justifier sa traduction. Certains procédés sont repris,
analysés et critiqués lors des séances de travail avec les étudiants. La rapidité et
l’efficacité de la recherche est une phase importante du travail et dans ce cas seul
l’entraînement porte ses fruits, il s’agit d’une phase de logique indispensable à la
production dans le cadre d’une relation avec un donneur d’ordre.
Comme on peut le constater, les différentes phases reprennent certains savoir faire
traditionnels en les appliquant aux nouveaux outils. Les étudiants d’aujourd’hui
doivent acquérir la dextérité, la rapidité, la pertinence et l’efficacité dans la recherche
et ainsi, par une pratique régulière, une méthodologie de la gestion de l’information au
service de la traduction.
 
RISQUES ET CONTRAINTES
 
Dans une deuxième phase, il est nécessaire d’amener les étudiants à réfléchir sur les
avantages et les inconvénients des nouveaux outils. Pour ce faire, le professeur peut
montrer les difficultés et les risques susceptibles d’apparaître lors d’une gestion
maladroite de l’information. Il porte un regard critique sur les sources et tient lieu en
ce sens de réviseur technique.
Pour pouvoir repérer et réviser de possibles erreurs, il faut tout d’abord apprendre à
cerner les points d’ambiguïtés, à savoir exposer et relever les doutes à tous les niveaux,
terminologie, sens, représentation. Il s’agit d’un travail plus détaillé appelant des
questionnements et des interrogations.
Certaines erreurs de sens sont liées à la recherche même qui oriente dans de
mauvaises directions. Le ‘net’ comme outil du traducteur est semé d’embûches. Le
formateur doit apporter aux étudiants les conseils et les moyens d’éviter les pièges du
net, aussi bien dans les bases de données (savoir repérer les erreurs ou éléments
douteux) que dans les sites, descriptifs, etc. Cet apprentissage fait aujourd’hui partie à
part entière du cours de traduction technique. Sans un guide des pièges et des
modalités de repérage des pièges, l’apprenti traducteur serait bien mal en point.
Des erreurs de sens peuvent être également liées tout simplement, si l’on peut dire,
à une mauvaise lecture des informations. Il est donc indispensable d’apprendre à lire et
à comprendre la distribution des actions d’un document technique. Pour ce faire, il est
bon d’insister sur la lecture des déroulements d’action dans le texte source
(représentation temporelle et spatiale) et de reprendre en classe des déroulements
d’action ou de procédés propres au domaine technique travaillé et repérés
préalablement par les étudiants sur certains sites, c’est ce que nous nommons la phase
de représentation spatio-temporelle. Elle marque l’acte de visualisation des actions
en vue de favoriser l’adéquation image et sens.
Parmi les contraintes liées aux nouvelles technologies dans l’enseignement, apparaît
de façon renforcée la question des choix. Si cette question fait depuis toujours partie
du travail du traducteur, elle est accentuée face à la multitude de certaines informations
parfois contradictoires ou du moins différentes. Il est nécessaire de travailler sur des
documents informatifs discordants pour évaluer l’esprit critique des étudiants et leur
enseigner les techniques et les différentes voies de réflexion nécessaires à l’acte du
choix.
La question du repérage des ambiguïtés et des choix, intégrée dans une
méthodologie reposant sur des exemples concrets de catégories suffisamment variées
et représentatives, permet à l’apprenti traducteur d’affirmer ses choix et de s’auto-
évaluer après la production. Savoir mettre à nu des difficultés issues de sources
extérieures, savoir analyser, raisonner et conclure sur des sources extérieures, c’est
aussi pour le traducteur savoir porter un regard distant sur sa propre production et
savoir s’auto-évaluer. En ce sens les nouvelles technologies dans la didactique servent
aussi d’approfondissement pour le travail de correction et révision des productions

propres aux étudiants. L’informatisation des données permet d’obtenir ce regard plus
distant sur son propre travail.
L’acquisition de la rapidité dans la gestion de l’information ne doit donc pas laisser
de côté le contrôle de cette dernière qui est un élément indispensable. Il faut alors
ajouter aux compétences citées ci-dessus de rapidité, efficacité, pertinence, une très
grande rigueur. Il s’agit ainsi de mettre à jour et de faire acquérir une méthodologie du
contrôle de l’information.
 
CONTRÔLE QUALITATIF
 
Ainsi, face à la situation de la traduction au coeur de la technologie moderne, le
formateur doit tenir compte des nouvelles sources d’information, enseigner la maîtrise
de ces nouveaux outils et les moyens d’en tirer le meilleur profit. Il tient à ce titre
également le rôle de conseiller en contrôle qualitatif.
Les étudiants doivent tout d’abord comprendre l’enjeu de leur travail et prendre
conscience de la nécessité de respecter en toutes circonstances (manque de temps,
défaut d’information, document peu clair, etc.) le critère de qualité et ce, dans le but
essentiel d’être crédible mais aussi de ne pas diffuser d’informations erronées à
l’utilisateur du document : phase déontologique.
A ce titre, il est essentiel que le futur traducteur sache, de façon complémentaire et
indissociable, faire appel aux ‘anciennes techniques’, à savoir le travail en binôme
avec le ou les spécialistes du domaine, la lecture d’ouvrages spécialisés, etc. La
traduction une fois effectuée, les quelques doutes qui pourraient subsister doivent être
levés par l’intervention du spécialiste. Là encore, les nouvelles technologies peuvent
être mises à contribution. Aujourd’hui il est plus aisé de communiquer par le biais du
courrier électronique. Il est possible d’écrire à des services spécialisés à l’aide d’une
adresse mail de contact ou à des spécialistes par le biais des entreprises ou des
connaissances propres à chacun.
La phase d’affinement permet d’apprendre à repérer les points de la traduction sur
lesquels subsistent des doutes et à les résoudre ou du moins à choisir : par exemple
pour la terminologie de publication ou d’usage, ou encore pour des éléments de
visualisation ou pour des produits spécifiques, etc.
La phase d’action est celle qui entraîne l’apprenti traducteur dans le monde du
contact humain : savoir trouver les bons interlocuteurs, repérer ses propres besoins,
choisir ses interlocuteurs, se faire un carnet d’adresses en fonction des domaines et
agir concrètement en envoyant des messages électroniques, en utilisant cette vieille
technologie qu’est le téléphone, etc. Cette phase c’est aussi apprendre à formuler des
questions claires et précises pour faire perdre le moins de temps possible à
l’interlocuteur. Il s’agit d’apprendre aux étudiants à sortir du monde virtuel (acte
inexistant dans les anciennes modalités didactiques et pour cause) et à revenir dans le
monde réel : le donneur d’ordre, le délai, la production et bien entendu le produit fini
et sa livraison. Pour apprendre à jouer contre la montre, il faut toujours mettre
l’apprenti traducteur en situation professionnelle bien ancrée dans le réel. Toutes les
phases d’études ne doivent pas perdre de vue la phase de production.
Une fois le document traduit, l’étudiant doit apprendre à passer la main pour une
ultime phase de contrôle par un technicien du domaine ou un traducteur spécialisé du
domaine, professeur ou autre, pour une relecture globale et définitive : Phase de
contrôle qualité.
Enfin, l’apprenti traducteur doit apprendre à préserver ses recherches en vue de
futures commandes et à stocker ses informations et bases de données à l’aide de
différents outils actuellement sur le marché : phase professionnelle de spécialisation.
Dans ce cadre, il doit toujours penser à actualiser en permanence ses données en
fonction de l’évolution des secteurs, des produits, des marchés.
Il s’agit dans cette troisième phase d’apprentissage, de faire acquérir dans le cadre
des nouveaux outils la méthodologie du contrôle qualité.
 
CONCLUSION: LES MÉTAMORPHOSES
 
Ces trois phases didactiques se complètent et s’intègrent les unes aux autres lors de la
mise en place du processus méthodologique.
Ainsi, l’expérience montre que, si les objectifs du formateur n’ont pas changé pour
l’essentiel (développer les compétences et le savoir faire pour passer d’un texte source
à un texte cible dans le respect de la qualité), les méthodologies d’approche des
objectifs sont d’ores et déjà métamorphosées. L’étudiant doit avant tout aujourd’hui
apprendre à gérer l’ampleur de l’information qui s’offre à lui, à canaliser et à
relativiser parfois les données auxquelles il a accès, et finalement à contrôler en toutes
circonstances la qualité du document produit. Ainsi, aujourd’hui, la démultiplication
des sources oblige à donner de nouvelles marques et de nouveau repères dans
l’apprentissage de la traduction technique.
 
 

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